La Turquie a lancé mardi dans le sud du pays la construction de sa première centrale nucléaire, un chantier de 19 milliards d'euros destiné à réduire sa dépendance énergétique vis-à-vis de l'étranger mais qui suscite les protestations des écologistes.
Le ministre turc de l'Energie Taner Yildiz et le chef de l'agence russe de l'énergie atomique (Rosatom), maître d??uvre du projet, Sergueï Kirienko, ont posé sur le site d'Akkuyu, au bord de la Méditerranée, la première pierre du premier des quatre réacteurs prévus, d'une puissance de 1.200 mégawatts chacun.
"Il n'y a pas de développement dans un pays sans l'énergie nucléaire. Une Turquie qui grandit ne peut se passer de cette énergie", a déclaré M. Yildiz.
A l'appel notamment de l'association Greenpeace, quelques dizaines de militants écologistes ont perturbé la cérémonie en bloquant la route d'accès au futur site nucléaire, avant de lever leur siège après l'intervention des forces de l'ordre équipées d'un canon à eau, ont rapporté les médias turcs.
D'autres manifestants ont dénoncé le coup d'envoi officiel de ce projet, notamment à Ankara et à Istanbul, où une banderole barrée du slogan "le nucléaire tue, nous voulons vivre" a été déployée devant le consulat de Russie.
Le gouvernement islamo-conservateur turc a engagé un ambitieux programme nucléaire civil qui prévoit la construction de trois centrales d'ici 2030, afin de diversifier sa production électrique et réduire sa dépendance vis-à-vis du gaz russe et iranien.
"Si cette centrale avait été bâtie il y a dix ans, nous aurions pu économiser 14 milliards de dollars (13 mds d'euros) en achat de gaz naturel", a souligné le ministre de l'Energie en donnant le coup d'envoi officiel des travaux du site d'Akkuyu.
- 'Obsolète et coûteux' -
La Turquie a prévu la construction d'une deuxième centrale nucléaire dans la province de Sinop (nord) sur la Mer noire. Ce marché, d'un montant estimé à 15 milliards d'euros, a été attribué en 2013 à un consortium réunissant le turc EUAS, les japonais Mitsubishi et Itochu, et le français GDF Suez.
Fin 2014, le Premier ministre Ahmet Davutoglu a envisagé publiquement la mise en chantier d'une troisième centrale d'ici 2030.
Le projet d'Akkuyu essuie de vives critiques de la part des écologistes, qui dénoncent ses effets sur l'environnement et sa localisation sur une zone à forte activité sismique.
"Il n'est pas nécessaire pour le pays de se mettre sur la voie de risques nucléaires imprévisibles avec une technologie obsolète et très coûteuse", a déclaré à l'AFP Jan Beranek, du programme méditerranéen de Greenpeace.
"La Turquie n'est pas prête à construire des centrales nucléaires", a ajouté M. Beranek en référence à la législation turque qu'il juge "inadaptée" à ce type de mégaprojets. "Cette inauguration n'est qu'une mascarade à l'approche des élections" législatives du 7 juin prochain, a conclu le représentant de l'ONG.
Mercredi, Taner Yildiz a assuré que la centrale d'Akkuyu serait capable de résister à un séisme de magnitude 9 et que les nombreuses stations balnéaires de la région ne seraient pas affectées par sa présence.
Le littoral méditerranéen turc attire chaque année des millions de touristes.
La Turquie a été frappée le 31 mars par une panne électrique géante inédite qui a touché frappé la quasi-totalité du pays et mis en évidence la fragilité actuelle de son réseau.
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